J'observe sa levée
Enji
Seulement 15 min sont passées,
Je suis toujours là à attendre. Plantée au même endroit.
La tête près de la vitre j’observe sa levée.
Quelqu’un a-t-il déjà pris ce temps, minutes après minutes, de regarder un gâteau pousser ?
Je peux dire, moi je l’ai fait.
Ce temps je l’ai pris et je ne pourrais pas le rendre.
Contempler cette montée.
Il est bien possible que je recommence.
Etonnante contemplation.
C’est un peu comme l’épanouissement d’une fleur.
Au début il ne se passe rien. Du moins tu penses qu’il ne se passe rien…
Mais dessous ma pensée, ça grouille, ça fourmille de vivacité.
Tout doucement, plus doucement que doucement une légère transformation.
Je ne parle pas de l’odeur, qui te surprendra à chaque fois.
L’odeur qui te relance dans un souvenir ou simplement aiguise ta gourmandise.
Je parle de la lente transformation physique, presque imperceptible, tenue, de ce savoureux mélange.
Et d’un coup, quand tu t’y attends le moins, changements, notables.
Une minute d’inattention et tu pourrais presque rater ce micro moment d’élévation.
Tu sais, un peu comme la magie d’un coucher du soleil. Il est là. Il, un soleil, puissant, imposant puis lentement, plus lentement que lentement il décroit. Soudainement il n’est plus là, il ne reste qu’une réminiscence.
Tu la vois cette magie là ? Ce moment, celui qu’il ne faut pas rater. Juste ce temps d’envoutement bien sur, puisque le processus est inversé.
J’aurais peut être pu parler d’un lever de soleil, comme je le connais moins je l’ai délaissé.
Et ben c’est pareil pour un gâteau aux pommes, au chocolat ou autres douceurs réconfortantes en devenir.
Il faut être présent à lui pour tout saisir.
Poussées par poussées je le vois se modifier, prendre sa place, se développer, s’imposer.
Il y a un aller-retour entre mon émerveillement à le voir s’épanouir et mon désir de le savourer, extrêmement attisé.
Il est là, de plus en plus orgueilleux, de plus en plus parfait.
Seulement 30 min sont passées…
Encore 10 à attendre, à observer.
Déjà mon attention s’est modifiée.
Je passe de l’intérêt à le voir se développer à mon envie grandissante de le manger, de me l’approprier.
Il n’y plus que cela qui compte, le gouter, m’en rassasier.
Bientôt ! Le décompte est lancée.
Je suis toujours là à attendre. Plantée au même endroit.
La tête près de la vitre j’observe impatiente sa levée.
Qui est Enji ?
"Je suis comédienne, un peu touche à tout, j’ai suivi le cursus d'un conservatoire de Théâtre à Grenoble, par la suite je suis rentrée au Fraco à Lyon pour me former au burlesque et au clown.
Je me suis orientée ces dernières années dans les Arts de Rue en passant par les échasses, la construction, le feu d’artifice, et bien sûr le travail du texte.
J’ai collaboré notamment avec la Cie Melle Paillette, Cie Parie Benares, le Groupe Tonne, Cie les Quidams. Actuellement je suis sur un solo, pour l’espace public, « Zoom » de Gilles Granouillet dans lequel je joues et que j’ai mis en espace.
Je suis également animatrice webradio pour « Bienvenue en votre Compagnie » émission théâtrale.
J’ai ouvert la porte de l’écriture il y peu, je rédige de petits textes deci delà !"